Manifeste pour une Révolution liquide

Nous sommes les gouttes d’eau qui deviennent le courant


∼ ∼ ∼

A mes amitiés ; à celles et ceux qui espèrent, qui cherchent, qui luttent à l’écart, dans les failles, qui se débrouillent dans le désert ou la tempête.
Mais aussi aux capitalistes encore convaincus, aux travailleurs et travailleuses, aux sceptiques, aux indifférents par simplicité, aux diplômés-satisfaits, aux modernes et aux progressistes, aux carriéristes jamais accomplis,
aux confortables tranquilles, aux gris-apathiques, aux inquiets immobiles et à la peur de derrière les volets.
Aux ambitieux, et aux égoïstes aussi.
A celles et ceux qui ont le temps et l’espace pour penser et agir,
A celles et ceux qui ne l’ont pas,
A toi qui me lis,
Voici_

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Ceci n’est ni un parti, ni un programme, ni un slogan, ni une méthode, ni quoi que ce soit d’autre qu’une idée à développer.


Postulat :
Chaque action sur le monde, de la plus petite à la plus grande, mérite d’être observée méticuleusement et ses conséquences envisagées à l’échelle globale, lointaine, holistique.


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_SENTIR LE FEU_

« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. »

Jacques Chirac, IVe Sommet de la Terre


À quoi tient une prise de conscience ? Les raisons qui nous poussent à lutter contre la forme générale de nos sociétés occidentales — c’est-à-dire le capitalisme néo-libéral et son système thermo-industriel, ainsi que les républiques représentatives qui l’accompagne — ont-elles besoin d’être réaffirmées ? Chaque jour apporte devant le pallier son lot de signaux qui poussent (ou devraient pousser) à la révolte. Des rapports scientifiques de plus en plus accablants sonnent chaque matin à la radio. On entend ainsi facilement au café que « Près de 60% des vertébrés ont disparu en 45 ans, d'ici 2020, cette perte pourrait atteindre 67%1 ». Tel les croques-morts de notre civilisation, nous suivons sur des écrans tactiles notre propre chute et la documentons en direct. « 90% de la biomasse des grands poissons ont disparus depuis le début de l’ère industrielle2 » annonce la radio entre deux pubs. Le Vivant s’effondre sous le coup des machines à produire de l’infini dans un monde fini et le jour de dépassement avance chaque année. Ce jour, « date de l’année à partir de laquelle nous avons pêché plus de poissons, abattu plus d’arbres et cultivé plus de terres que ce que la nature ne peut nous procurer au cours d’une année » à été atteint, en 2019, le 29 juillet. A partir du mois d’août, nous vivons à crédit sur le dos d’une planète qui s’embrase. Il « marque également le moment où nos émissions de gaz à effet de serre auront été plus importantes que ce que nos océans et nos forêts ne peuvent absorber»3. L’équilibre est rompu. Malgré tout, le patronat et leurs marionnettes continuent de vendre et promouvoir leur paradoxe moderne, s’enrichissant sur une exploitation honteuse des humains et du Vivant, faisant payer au plus grand nombre les caprices d’une minorité.
Nos sociétés atteignent l’inhumanité dans leur désastre social et humanitaire. « En 2018, en France, 566 personnes ont trouvé la mort sur le pavé. » selon le collectif Morts de la rue. En quatre semaines de l’été 2019, pendant que d’autres se badigeonnent de crème solaire « plus de 600 migrants, dont des bébés et de jeunes enfants, se sont noyés en Méditerranée » annoncent Médecins sans frontières. Ce que les gouvernements appellent «  crise migratoire », semble pourtant peu face aux prochains sursauts géopolitiques à venir. En effet, L'Internally Displacement Monitoring Centre a décompté quelque « 83,5 millions de réfugiés climatiques entre 2011 et 2014 alors que l'ONU prévoit qu'ils seront 250 millions d'ici 2050. ».
La liste des catastrophes est déjà longue et ne cesse de s’agrandir.
Alors, avons nous encore et toujours besoin d’argumenter ?

« Ce n’est pas signe de bonne santé mentale que d’être adapté à une société malade. »

Jiddu Krishnamurti


Dans ce sombre tableau, d’autres voient le confort moderne comme la raison de perpétuer ce modèle. « Nous n’avons jamais vécu aussi bien » est une phrase qui colle sous la semelle. Cette pensée est l’exemple même des logiques simplistes, individualistes et court-termistes qui sont reines dans nos sociétés. Ce confort est pourtant l’enfant d’un apartheid économique et écologique mondial.
D’un apartheid économique, car ce sont toujours les plus riches qui le consomment, ce confort, et les plus pauvres qui le produisent. Ce confort s’appelle donc de l’exploitation.
D’un apartheid climatique, car de la même manière, ce sont les pays les plus riches qui pourront le mieux se doter de moyens afin de s’adapter aux prochains bouleversements météorologiques et les pays les plus pauvres qui les subirions le plus violemment, et verrons peut-être, le jour où il chercherons l’exil, les frontières des pays qu’ils fournissaient se fermer devant eux. Par ailleurs, ces mêmes populations sont pour les moins responsables de ces catastrophes. Peux-on ainsi nommer « confort » un mode d’exploitation qui en même temps d’enrichir les plus riches entraîne l’impossibilité de vivre dignement pour une large partie de la population ainsi que pour les générations à venir ? Selon l’OUN, « le changement climatique menace de défaire les progrès des 50 dernières années (...) en matière de réduction de la pauvreté ».
Finalement, en plus d’être néfaste, ce système se révèle inefficace en terme de productivité, quand on sait qu’il faut « en moyenne dix à douze calories d’énergie fossile pour apporter une calorie alimentaire dans notre assiette.4 » et que « notre alimentation représente un tiers des émissions de gaz à effet de serre de la France.5 » Inefficace à nous nourrir sans détruire la vie et l’agriculture elle-même, ce qui peut tout de même sembler inadmissible, quand on sait que « depuis les années 1960, un tiers des terres arables de la planète a disparu du fait de l’érosion, accentuée par l’essor de l’agriculture industrielle et de l’artificialisation des sols6. L’ équivalent de la superficie de l’Italie est ainsi perdue chaque année7. » et sans nous détruire nous même, avec toute cette chimie.
Comment, dès lors, nommer « confort » ou « progrès » une organisation sociétale basée sur l’exploitation, et qui, en produisant sa marchandise et sa nourriture-poison empêchera les prochaines générations de satisfaire dignement leurs besoins vitaux, ainsi qu’à l’ensemble du Vivant de perdurer ?
Nous ne pouvons qu’appeler cela bêtise, scandale ou génocide.
Aurons nous un jour, comme certains peuples l’ont eut, la sagesse de prendre des décisions politiques en envisageant leurs impacts sur les sept prochaines générations ?


Dans cet échec Humain, le système, n’ayant d’autre choix que de continuer selon les codes inhérents à son ADN, à savoir la course au profit et à la production, semble se mener à sa propre extinction. Poursuivant toujours car verrouillé, il joue chaque coup plus dangereusement que le précédent. La crise monétaire et écologique oblige les élites à prendre encore plus de risques, à aller encore plus loin dans le mensonge, le cynisme et la destruction des fondements du système. La crise fait son travail : elle sape, elle ronge, elle fragilise – la taupe creuse. Dans cette brèche, nous pouvons percevoir une lueur : celle de la chute de l’Ancien monde, et peut-être, la construction du nouveau. Comme disait Antonio Gramsci, « Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres », nous avons donc un devoir historique à surveiller cet accouchement pour ne pas laisser sortir des flancs fétides de nos mondes modernes une nouvelle créature fasciste. Un travail important est à donc à mener sur les champs de la connaissance, de l’information, de l’éducation populaire et des luttes sociales. Pour mener à bien ce combat, nous ne pourrons nous suffire de critiquer l’adversaire, ce qui reviendrait à un pauvre jeu de postures mais nous devrons produire des idées nouvelles tout en affirmant l’idéal révolutionnaire, les mettre en oeuvre et créer ainsi une véritable culture de résistance. Nous devrons sortir des analyses individuelles pour entrer dans des logiques structurelles et systémiques.
De la même manière, nous ne pourrons démanteler telle ou telle structure sans songer, annoncer et amorcer en même temps ce par quoi nous la remplacerons.

« Le fascisme n’est pas le contraire de la démocratie mais son évolution par temps de crise. »

Bertolt Brecht

Il en vas donc de notre responsabilité envers le Vivant, envers les enfants, qui sinon un jour nous demanderons « Qu’avez-vous faits pendant si longtemps ? »…
Aussi, il convient de se demander combien coûte notre collaboration et quels seraient les bénéfices de notre refus, de notre résistance. Les réponses couleront…


Enfin, car il est aussi question de philosophie, n’est-il pas nécessaire de chaque jour tenter de se défaire de toute forme d’enfermement, d’aliénation, d’exploitation ? De toujours chercher à tendre vers la justesse et ainsi faire de chaque acte, chaque pensée, chaque moment de vie une insurrection en soi ?
Cette visée implique donc une lutte quotidienne — et merveilleuse — pour ne pas se laisser emprisonner ou séduire par les idées communes, le bon sens, les modèles, les dictats, qu’ils soient durs ou doux. Cultiver une révolte journalière pour ne pas se soumettre à l’autoritarisme ambiant, aux dominations et aux oppressions quelles qu’elles soient. Contredire les vérités. Etre critiques plutôt que dupes ! Remuer, remettre en question. Un peu de doute !
L’Etre cherchant la liberté et l’authenticité ne peut donc être qu’anti-conformiste et révolutionnaire. Quelle joie insolente que de vivre ainsi !
Alors, avons nous aujourd’hui d’autres perspectives possibles que celle de la lutte ?

Ne vous en faites pas,
Bien que grave, elle sera belle et joyeuse
Car n’y-a-il pas une folie heureuse, ici
A reprendre en main nos vies ?


Beaucoup à déjà été perdu.
Du sens de nos sociétés à la joie dans les rues,
Des forêts centenaires à la pureté de l’air,
De la croyance en l’avenir,
Au bonheur d’exister au présent,
Beaucoup à déjà été perdu,
Alors nous avons tout à gagner
Toutes les raisons d’essayer
Et plus aucune pour que les choses restent ainsi.


Camarades,
N’avons nous pas assez parlé de Révolution ?
Faisons-là !

∼ ∼ ∼

« Que tout continue ainsi, voilà la véritable catastrophe. »

Walter Benjamin

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Notes :
1/ WWF - 27/10/2016
2/ Ransom Myers et Boris Worm ; revue Nature - 2013 3/ ONU
4/ Patrick Whitfield, The Earth Care Manuel Permanent Publications, 2004
5/ Dominique Guillet / « Planète Terre, planète désert ? » 2007
6/ ONU, La France agricole, 2010 7/ Jean-Marc Jancovici


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_TROUVER L’EAU_
Car le modèle dominant est nocif, il est raisonnable, moral, et nécessaire d’assumer une certaine conflictualité avec celui-ci.
A ces fins, l’effondrement en cours de nos sociétés et écosystèmes est à percevoir comme une occasion, une brèche par laquelle s’engouffrer et ruisseler pour irriguer l’aride, pour amener un renouveau.

_Nous sommes les coups d’ailes dans les contre-vents_
_Nous sommes l’éternité dans les contre-temps_


N’étant rien d’autres que vivants parmi le Vivant, nous devons tirer des leçons de cette vie qui nous croise et qui nous constitue.
Ainsi, nous serons comme l’Eau car le désert avance et pour que le torrent surgisse, nous muterons sans cesse en fonction du terrain, des situations et des objectifs, nous transformant du Solide au Gazeux en passant par le Liquide.
Car étant responsables des ravages, nous oeuvrerons à démanteler le capitalisme, l’Etat bourgeois, le patriarcat, ainsi que toute forme qui oppresse et exploite le Vivant.
Nous serrons innarêtables, efficaces et libres.
Nous serrons liquides.
Qui arrive à garder l’eau dans ses mains ?



ETAT SOLIDE / APPARAITRE_
Il n’est pas trop tard pour sortir de chez soi mais il est encore trop tôt pour y rentrer.
Pour celles et ceux qui ont encore peur, la frayeur est justifiée mais doit être dépassée. La peur est la fille-épouvantail d’un système qui assoie sa gouvernance par la terreur. La peur du manque d’argent ou d’emploi. Puis la peur du travail. La peur de l’autre. La peur d’affirmer son identité ou de ne pas la trouver. La peur de l’échec. Ces angoisses ont des causes structurelles, inhérentes à la construction socio-économique dans laquelle nous vivons : celle d’un système capitaliste et patriarcal, bâti sur la concurrence, le profit personnel et l’opposition des classes. La peur est une conséquence des dérives pathogènes de cette organisation ainsi qu’un outil de taille. Sentiment puissant et facilement injectable, elle permet au pouvoir en place deux choses bien pratiques : garder la population sous contrôle, et, de surcroit, lui proposer de quoi la rassurer. Le terroriste se mue ainsi en protecteur, vendant la sécurité après avoir semé terreur, et par là, ressert ses chaines.
Ainsi, le système, au lieu de créer des êtres émancipés fabrique des manques et des besoins, tout se positionnant comme étant la réponse à ces derniers. Il crée offre et demande, puis propose sa marchandise, ses produits-parrures. Et si jamais la colère monte, il arme sa police, gonfle ses médias et crée, enfin, la peur de la révolte.
En se structurant ainsi, un tel gouvernement ne peut se rendre qu’illégitime et par cette mèche, allumer l’insurrection qui devient un droit et un devoir.


De la même manière, à celles et ceux qui disent que la révolution est impossible car l’Humain est intrinsèquement mauvais ou avide, nous répondons aussi que non, qu’on ne naît pas femme ou homme mais qu’on le devient, et que lorsqu’on grandit dans des structures d’oppression et de compétition, nous finissons forcément par en absorber le goût et la forme, ce qui n’est qu’une raison supplémentaire pour chercher à abattre chacune de ces architectures-prison.


Finalement, la peur n’est-elle pas qu’un fantôme, qu’un subterfuge à déconstruire afin d’être Verbe et non plus sujets ? Nous ne sommes pas seul.e.s. Il y a une joie profonde et une sérénité logique à l’idée de nous organiser collectivement pour nous émanciper plutôt que de sombrer dans les mailles du filet et les courbures de ses angoisses…
Alors allons ! Il y en a pour tout le monde, et tout le monde est là.
Il nous faut le nombre, la multitude des profils, des techniques, des idées, des actions. Il nous faut prendre soin de ce qui nous rapproche et tirer profit de ce qui nous distingue. Mais il nous faut surtout nous rencontrer. Au delà de l’individualisme et de la flânerie poétique, les actions naissent des unions, des échanges, des liens. Du faire-ensemble. A l’heure où les réseaux dits « sociaux » et les médias de masse ne créent que de la solitude ; à l’heure où le seul endroit où l’on nous invite à prendre part à la politique s’appelle un isoloir, plus que jamais, il faut sortir ! Sur le palier de sa porte, puis dans la rue, sur les ronds-points, sur les marchés… Car la connaissance du monde est préalable à l’envie de le transformer, il est nécessaire de se créer des espaces d’échanges collectifs, des assemblées pour échanger des savoirs, pour sortir des ghettos de la pensée, pour troquer des idées et amorcer des actions tout en partageant un horizon commun.
Improviser partout des ZAD : Zone A Discuter, Zone à Délirer peut-être. Zone A Démultiplier bien-sûr. Allons à la rencontre, et organisons-nous !

-> Aller vers les Bases Avant_
Attaquer • Destituer • Subvertir
Car le capitalisme attaquera sans relâche et sucera jusqu’à la dernière goute de ce qu’il pourra transformer en profit-dollar, qu’il détruira chaque alternative qui viendra enrayer son productivisme acharné, qu’il traquera jusqu’à ses derniers opposants pour les remettre dans le rang, il est nécessaire de ne pas faire que défendre, ce qui reviendrait à toujours perdre du terrain, mais aussi d’attaquer. Car cette organisation socio-économique prend bien la forme d’une guerre contre le vivant, c’est dans un effort de guerre que nous devons avancer et nous organiser.
Alors nous ferrons la Guérilla.

*« Ceux qui aiment la paix doivent apprendre à s'organiser aussi efficacement que ceux qui aiment la guerre. » * Martin Luther King Jr.

Le capitalisme ne se structure que par la violence des rapports de force qu’il crée en lui-même (d’une classe sociale contre une autre, d’un genre contre un autre, d’une vie contre une autre…), ainsi nos méthodes doivent se concevoir avec la même approche : celle du rapport de force que nous glissons entre nous-exploité.e.s et lui-exploitant, afin de nous en libérer. Le rapport de force est tout ce qui reste car la discussion est depuis longtemps rompue. La bourgeoisie, avec son grand patronat, son Etat, sa police et ses médias n’abandonnera sûrement jamais ses privilèges toxiques, même face à des inégalités sociales croissantes et l’extinction des écosystèmes. Leurs profits étants justement basés l’exploitation et l’inégalité, peut-être donneront-ils d’une main pour reprendre de l’autre, mais ils n’y mettront pas fin, ce qui reviendrait à se destituer. Ils ne se sont jamais sacrifiés, et ne le feront jamais. Selon le Billionaires Index de Bloomberg, « en 2018, les 13 personnes les plus riches de France ont ajouté 27,6 milliards de dollars à leur fortune (environ 23,4 milliards d’euros), soit 12% de plus qu’en 2017. »
Alors ? Alors la bourgeoisie est à inquiéter jusqu’à ce qu’elle abandonne ses faveurs, et le cas échéant, à détruire en tant que structure. A nous de nous ré-approprier et collectiviser les outils de production, d’organisation et de décision politique.

« Comme l'état est né du besoin de refréner des oppositions de classes, mais comme il est né, en même temps, au milieu du conflit de ces classes, il est, dans la règle, l'État de la classe la plus puissante, de celle qui domine au point de vue économique et qui, grâce à lui, devient aussi classe politiquement dominante et acquiert ainsi de nouveaux moyens pour mater et exploiter la classe opprimée. »

Engels

Dans leur développement, les actions sont donc à concevoir sous l’angle de l’efficacité, c’est-à-dire du degré de modification qu’elles amènent ou non. A ces fins il n’y a aucune règle stricte, seule une observation minutieuse de chaque terrain de lutte déclenchera le bon geste : celui qui fera pencher le combat vers sa victoire. Afin de s’adapter à différentes situations et enjeux, les actions peuvent et doivent être le fruit de multiples techniques. Aucune ne se suffira à elle-même et toutes doivent jouer et s’apporter, se compléter : le tout est plus que le somme des parties, mais la synergie qui s’y déploie.
Afin d’étirer le spectre stratégique de résistance, il est nécessaire de sortir du dogmatisme de la non-violence. Si chaque méthode à ses limites, aucune ne doit devenir le cadre empêchant l’autre de se réaliser, sauf si cette dernière nuit au processus révolutionnaire dans son ensemble. La non-violence atteint les siennes quand elle se retrouve inefficace et bornée. Si elle ne mène qu’à des statu-quo, alors il est nécessaire d’avouer ses faiblesses et muter. Le pire serait qu’elle devienne une norme aux mouvements, qu’elle se porte caution de la bien-séance des révoltes. Quel oppresseur ne sait pas heureux d’une telle auto-régulation du conflit ? A ce point de rupture, le pacifisme collabore en protégeant le pouvoir en place. Par ailleurs, n’est-il pas simple de se réclamer de la non-violence quand on n’en subit aucune ? La non-violence stricte ne porte-elle pas en elle la violence même des rapports de classe, où des privilégiés prônent la paix sans avoir jamais éprouvé le quotidien de ceux qu’endurent la guerre ? Ne se coupe-elle pas, en les essuyant d’un revers, de toutes les autres pratiques insurrectionnelles qui ont pourtant parfois fait leurs preuves ? Elle risque ainsi de se priver d’autres partisans pourtant bien concernés pour mener les luttes à bien. Elle peut néanmoins être stratégiquement pertinente sur d’autres aspects.
La violence quand à elle est à placer au bon endroit, à canaliser et n’est pas non plus à adopter de manière systémique, si un autre levier est plus efficace.
L’idéal est que ces deux méthodes s’apportent et se supportent. Que, par exemple, des actions de sabotage soient relayées et soutenues par de grands mouvements populaires, que des activistes faisant usage de la force lors d’une occupation de place soient ravitaillés par des cantines de rues elles-mêmes soutenues par des voisins… Allions-nous !
Mais que ces alliages soient numériquement grands importe parfois moins que le fait qu’ils soient finement noués et déterminés. Le nombre ne fait pas forcément la force ni l’acuité. Un groupe de dix personnes frappant juste est sans doutes plus efficace que milles personnes confuses… Soyons précis, et cherchons alors à devenir une multitude de personnes qui frapperont juste ! Pour l’organisation d’une action, n’oublions peut-être pas d’en évaluer les risques juridiques, ce qui permet d’en définir le plan, les moyens, la participation et la défense (avec au possible une équipe juridique.)

Il y a toutes les latitudes possibles pour que chacun et chacune trouve sa place et son degré d’implication dans le mouvement.
L’essentiel est de participer à l’élan, à la pression,
A cette force dynamique,
A cette force… dynamite !



-> Vers les Groupes Locaux de Résistance_
Partir de notre milieu de vie. De ce que nous connaissons, de ce que nous chérissons, de ce qui, finalement à force d’habiter, nous constitue : ce quartier où nous avons des souvenirs, ce champ où nous avons couru enfant, cette forêt qui cache des trésors, ce ruisseau qui abrite des secrets… Agir où nous sommes en puissance et où nous en sentons les effets, ce qui donne toujours du coeur à l’ouvrage ! Alors, car aucune zone ne peut être épargnée des attaques du capitalisme, chaque zone est à défendre et ce qui lui portera atteinte est à attaquer. Le monde est une Zone A Défendre.


Pour ce faire, créons les Groupes Locaux de Résistance.
Commencer par recruter proche de soi, dans les amis, les voisins, là où nous avons prise puis élargir. Se constituer en groupes pour mener des veilles et actions sur les sujets sensibles, propres au territoire proche, palpable. Le pouvoir a déserté ses lieux d’exercice traditionnels pour aujourd’hui se définir par des structures économiques, il s’incarne alors d’avantage dans des chiffres, des flux de marchandises et leurs infrastructures que dans quelques lieux jadis politiques. L’empire techno-capitaliste est un système aussi fragile qu’il est connecté. Il n’est tissé que de points locaux faillibles, attaquables, ainsi, paralyser un de ces point, aussi précis qu’il soit, peut revenir à verrouiller l’ensemble du réseau, et ouvrir le rapport de force. Il y a dès lors plus d’efficacité à bloquer un axe routier qu’à manifester devant un parlement, plus de lucidité à défendre une zone et la libérer que de signer des pétitions et faire des marches, plus de bon sens de créer de nouvelles structures de travail et d’entre-aide que d’attendre les allocations. S’emparer de la politique devient alors une action physique, un sport de combat. Les idées doivent descendre s’incarner dans la matière. Créer les groupes locaux de résistance permettrait ainsi de mener les actions servant cet horizon : la destitution du capitalisme, la suppression des rapports d’exploitation et la protection du Vivant.
Ces groupes locaux pourraient comporter des sous-groupes affinitaires dans lesquels chacun et chacune trouverai son niveau d’implication et de risques acceptés. Encore une fois, il y a de la place pour tout le monde.
Les actions seraient ensuite à définir selon les cibles et objectifs établis par les groupes/sous-groupes : faire plier des entreprises néfastes, ouvrir des ZAD, saboter quelque outil du capitalisme, faire une veille sur une structure carcérale tel qu’un Centre de Rétention Administratif, paralyser l’accès des employés à tel siège social, diffuser des tracts et journaux afin de fertiliser le terreau résistant, bloquer et occuper des sites de vente, de production ou des axes de transport, mener des opérations d’affichage sauvage ou de tag, ouvrir des habitats d’urgence et des cantines de rue, s’autonomiser en nourriture, organiser des manifestations, créer des lieux d’échange et de débat, des zones de gratuité, soutenir d’autres luttes… Le travail ne manque pas !
Ces groupes locaux peuvent et doivent ensuite se coordonner à plus grande échelle : se synchroniser, amplifier le tissu de résistance et passer du quartier à la ville, de la ville au département, du département à la région et ainsi de suite, via des assemblées d’assemblées, afin de mener de plus vastes opérations et ainsi participer au démantèlement généralisé des structures d’oppression et d’exploitation.
Le Local fait le global, et si l’économie est devenue mondiale, les insurrections le seront aussi ! Préparons-les.


Nous ne connaissons pas la zone, nous sommes la zone.
L’efficacité d’une action dépends de la connaissance que nous avons du territoire sur lequel elle se déroule. Alors il compte de le connaitre, de le traverser, de l’étudier pour y être en puissance. Connaitre chaque ruelle et leurs parts d’ombres. Leurs cachettes. Leurs pièges. Leurs échappatoires. Nourrir la proximité. Dans le petit périmètre de notre milieu de vie, dans ce coin, ce quartier, ce village, cette forêt, nous pouvons et devons trouver des alliés, des supports de tous types. Combien d’amis, de passants que l’on croise tous les jours dans la rue sont peut-être révolutionnaires sans le savoir ? Combien désirent entrer en résistance ? Combien n’ont pas idée qu’ils devraient le faire ? Combien voudraient rompre leurs chaines sans oser l’avouer, sans s’en sentir capable ou légitime, sans sentir de soutien ; sans, finalement, savoir toute leur puissance insurrectionnelle ? Ne pas être conscient de sa force, s’est avoir appris à la mépriser. A se méconnaitre. A cultiver sa passivité et ses dépendances. A chacun, chacune, ses pleins pouvoirs ! Le potentiel mouvement de libération face à un système oppressif est découpé et partagé entre chacun des membres de ce même système. Alors il faut prendre soin des appuis proches. Nourrir les intimités locales. Informer les voisins. Faire parler les rues. Gagner en proximité et appeler à être rejoint pour amplifier la résistance : la force collective ne se crée qu’au contact.
Nous sommes toutes et tous un maillon de la collaboration, ou de la résistance.
A choisir.


Agir implique de ne pas être pris, donc la discrétion de mouvement, d’organisation et de communication interne.
Agir implique d’être vus, ou que les conséquences de l’action le soient.
Faire basculer le poids, la densité, du côté de la lutte. Transformer l’état des choses, passer du stérile au fertile, de l’inerte au mouvement, de la domination à l’insurrection.
Nous sommes le sérum.


-> « Manifester l’occulte / occulter l’apparent »_
L’information est une bataille. L’armée ennemie se gave d’électricité pour ses publicités virtuelles surdimensionnées, elle dispose d’écrans de propagande dans chaque foyer et même dans les mains de la population. Nous ne combattons pas à armes égales. Se battre contre un système sans avoir le peuple avec soi revient sans doutes à s’immoler par le feu tout en voulant l’éteindre. Concurrencés par des sociétés privés prédatrices, il nous faut donc nourrir la révolte et la culture de résistance par tous les moyens, il faut documenter nos actions et idées et les faire entendre et valoir ! Il nous faut nous outiller intellectuellement et collectivement. Injecter le vaccin à coups de tracts propagés dans les rues, distribués de main en main ou via des infokiosques ouverts sur les marchés, les festivals, les manifs. Informer à coups de textes jetés dans les boites aux lettres, de journaux locaux, de messages écrits sur des billets de banques (qui n’en perdent pas leur valeur) ou tagués au sol, d’affichage sauvage, de projections de documentaires, et d’assemblées où l’on peut se réunir, discuter et débattre. Aussi, reprendre les outils et les canaux virtuels de l’adversaire, les tourner à notre avantage : hacker les médias et leurs supports, inonder les réseaux-sociaux de contenus d’information sous toutes les formes : vidéo, photo, musique, fichier texte. Etc…
Muer jusqu’à être partout, nous qui ne sommes personne.
Agir en politique, s’est se mouvoir plutôt que d’être manoeuvré. Le pouvoir n’a de pouvoir que si on lui en donne, alors rompons les liens qui nous aliènent pour en définir de nouveaux : ceux d’une résistance qui se tient ensemble, debout !
Hybrider les pratiques et se rendre polymorphes, innarêtables et rejoignables.

« Il ne faut pas compter sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre. »
Albert Einstein


-> Catharsis du brise-glace_
En prétendant créer, le capitalisme détruit.
En le détruisant, nous ouvrons une marge pour créer.
Concernant le sabotage, la règle est simple : un minimum de risques, un minimum de temps, un maximum de dégâts.
Il demande préparation, rigueur et organisation afin d’être un acte de finesse, furtif.


Nous saboterons car c’est tout ce qu’il nous reste pour stopper le drame quand les machines sont sourdes et le pouvoir aveugle.
Nous saboterons, car chaque alerte lancée ne fait que le bruit de son écho contre les parois des abysses modernes.
Nous saboterons car c’est la seule manoeuvre que nous laisse le système actuel, plus déshumanisé que jamais, où le pouvoir réside moins dans des assemblées humaines que dans des infrastructures, des chiffres et des machines, et puisqu’on ne parle pas à une machine, nous la casserons.
Nous saboterons vos logiques,
Nous saboterons vos plans,
Nous saboterons vos outils,
Et nous continuerons jusqu’à l’arrêt du capitalisme et de son Etat complice.
Le capitalisme ne peut-être ni réformé, ni civilisé, il n’est qu’à détruire. Voici notre bulletin de vote.
Ni gauche, ni droite : Nitroglycérine.

« Le pouvoir est maudit, c’est pour cela je suis anarchiste. »

Louise Michel


L’insurgé qui s’en prend aux ustensiles de l’Ogre Etat-Capital pour les mettre hors d’état de nuire ne fait-il pas dans son acte preuve de raison ? Casser une banque, n’est-ce pas affirmer ouvertement leur stérilité ainsi qu’un désire fort de rompre avec elles ? Affronter la police et les mettre en échec, n’est-ce pas les reléguer au rang de milice d’Etat — rendus légitimes par leur employeur frauduleux ? C’est redéfinir les rôles, faire basculer la peur et la puissance. L’acte de détruire les outils-symboles de d’un oppresseur n’est-il pas signe d’une bonne santé du peuple face à une gouvernance nuisible ? Dans une pulsion de vie, l’opprimé dépose sa colère, la métamorphose en bris de verre, la transforme en un feu qui brûle. C’est donc déjà agir, se manifester, se transformer. Ne pas rester docile. Oser avancer. Assumer le conflit. Signaler la rupture. Communiquer un refus. C’est une masse qui se libère en régurgitant la violence absorbée au fil du temps…
Est-ce légitime ? Est-ce seulement à la hauteur du drame ?
Quand à la manifestation sauvage, n’est-elle pas une prise de liberté par excellence ? Il serait biaisé de dire que ce ne sont pas des moments émancipateurs et constructifs. C’est reprendre, à coups de « Ahou ! », la rue qui est à nous. L’arracher aux mains des publicitaires, de l’argent et des pouvoirs publics. C’est redéfinir notre rapport à la ville, l’habiter pour une fois concrètement, elle qui n’est plus que traversée par des spectres en chemises… C’est créer de nouveaux contacts avec le tissu urbain. On ne peut que saluer la dextérité et le courage des architectes des barricades qui savent déboulonner la mégalopole et son mobilier pour la transformer à leur avantage, qui la libèrent de ses fonctions de base. Qui la piratent. Qui forgent de nouveaux outils et symboles en faisant fondre les anciens en fusion.
C’est finalement apprendre en faisant, trouver des amitiés, des appuis pour faire front ensembles. C’est tisser des liens étroits avec une horde d’inconnus, se tenir unis pour avancer vers un horizon lointain, contre un ennemi commun. C’est l’entre-aide et la camaraderie au stade insurrectionnel. C’est, face aux dérives autoritaires, l’auto-défense populaire. Ainsi, n’est-ce pas un acte social et fédérateur, donc constructif ? Reste toujours à savoir ce que l’on construira une fois la cible détruite. Avoir une ligne de fuite, un horizon-commun et être sûr que celui-ci soit bon et partagé est dès lors essentiel. Ceci demandera des réflexions collectives et plus largement une véritable culture de résistance, une assise populaire pour mettre debout, jour après jour, le monde que l’on souhaite et non un pale travesti de celui que nous cherchons à destituer. Finalement, car cela revient à parler de violence, celle-ci est à envisager comme se déployant au sein d’un système oppressif.

« Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés. La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première.

La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres.
Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. »
Helder Camara.

De la non-violence à l’action directe, le spectre est large et la seule question importante reste celle de l’efficacité même des actions : gèlent-elles la situation ou amènent-elles à la révolution ?

L’heure n’est plus à la revendication, à la demande mains tendues, nous avons compris qu’ils ne lâcheront rien. Nous non plus !
Non, l’heure est venue de tout exiger sans rien demander, de se ré-approprier ce qui doit être nôtre : le choix de nos conditions d’existence et de la manière dont nous voulons la mener ; de la création d’un présent désirable et d’un avenir possible ; de la répartition de ce qui doit être commun et de la suppression de ce qui nous opprime ; de la création des Communes et des Zones Libres.

∼ ∼

_ETAT LIQuiDe / Dispar.. .
Se dissoudre :
Car nous ne sommes personne, car nous n’existons pas, nous pouvons être tout le monde.
Car nous ne sommes personne, car nous n’existons pas, ils ne nous attraperont pas.


-> Nous ne sommes pas en mouvement, nous sommes le mouvement_
Il s’agit ici de se liquéfier.
De pénétrer les interstices pour s’infiltrer comme l’eau dans le bitume craquelé des citadelles. Savoir se diviser en petites gouttes face à l’obstacle puis redevenir le torrent. Submerger, devenir le raz-de-marée là où ils attendent la sécheresse. Etre mobile et furtif.


Puces RFID, géo-localisation, fiches S, marqueurs toxiques sur les manifestants, caméras à reconnaissance faciale, drones et radars, raft de nos données personnelles, capteurs et senseurs : Nous vivons dans une société de contrôle et de trace. Une société de traque. Petit secret : nous sommes les proies et le produit !
Les technologies sensées nous libérer nous ont finalement asservies. Nous travaillons pour elles et les obtenir plus qu’elles ne travaillent pour nous et nous émanciper. Aujourd’hui, à l’heure du Big-Data, peu d’actions dans le monde réel ne sont pas virtualisées, traitées, stockées et revendues. A chaque clic numérique et maintenant à chaque pas dans le réel nous laissons des traces virtuelles utilisables et commercialisables. Nos vies s’algorithmisent. Nous devenons sujets d’étude pour que les IA des grandes compagnies traitent nos informations personnelles afin d’adapter leurs offres de biens et services. Nos comportements (et leurs interprétations) deviennent une valeur marchande : nous devenons en même temps les vendeurs, les magasiniers et les clients de nos propres existences. La facture sera amère quand il faudra passer à la caisse… Et à la caisse, la caissière, pauvre caissière, n’est-elle pas elle aussi traquée, son travail analysé en temps réel et livré ainsi par une IA complice aux nouveaux modes de management ? Humain diminué par machines augmentées. Nos vies tendent ainsi à être chiffrées et pilotées par la donnée. Ainsi, le techno-libéralisme diminue sans cesse l’espace vacant entre l’humain et les multinationales. L’incitation à la consommation devient omniprésente et ultra-personnalisée. Capitalisme sur mesure. Notre intimité devient un produit de marketing. Comment accepter cela ? Encore une fois, ne parlez pas de confort !
Enrayons la machine.


Veillons aussi, par sagesse, à ne pas nous définir, pour ne pas risquer l’étiquetage ou la trace.
Ne pas personnifier une action ou une lutte nous qui aujourd’hui sommes constamment invités à faire de notre identité un spectacle ou un produit.
Ne pas créer de prise que l’adverse saisirait. La liberté se vit à visage masqué parait-il…

« L’art de surgir, la force de disparaitre. La force de surgir, l’art de disparaitre. »


-> Cultiver les angles morts_
Ne plus se soustraire à la traçabilité s’est prendre sa liberté de mouvement et d’existence. Anonymiser nos mouvements, c’est échapper au système Panoptique de surveillance générale, réel ou supposée, qui modifie jusqu’à nos comportements quotidiens. C’est évident, prendre les angles morts nécessite un temps plus long que de suivre les chemins balisés mais nous prendrons le temps qu’il faudra et qui est le nôtrepour naviguer sur les voies de traverse.
La révolte n’est pas source de confort mais offre le bonheur immédiat de choisir son monde.
« Veillez à signaler tout comportement suspect » incitent les haut-parleurs des gares de train et autres HUB. Refuser d’être traqué, observé, analysé, c’est refuser de modifier sa dégaine, son comportement, sa manière d’être. Le système de contrôle le plus puissant, le mieux installé, le plus dur à démanteler, est celui fixé dans nos crânes. Dans nos petites boites crâniennes carcérales. Le sentiment d’observation constant ne peux qu’altérer le comportement des individus se sachant — ou se croyant — observés. Le tour de force est ici. CCTV est dans nos têtes. La surveillance la plus efficace est celle que le système nous incite à faire en nous poussant à des dynamiques d’auto-observation,
d’auto-régulation et d’auto-censure. Alors oeuvrerons à disparaitre. A domestiquer les zones d’ombres pour en faire des allées de passage. A devenir furtifs. Se soustraire au réseau, c’est se mouvoir dans ses interstices. Apprendre à les connaitre. A les apprécier. C’est donc longtemps l’observer, l’analyser pour trouver la faille par laquelle s’évaporer. Encore une fois, c’est une danse avec le système. C’est une discipline hautement plus active que la tranquillité offerte aux usagers-premium du réseau connecté. D’ailleurs, ils sont simples à repérer : ils dorment ou se délassent sur des écrans puis bippent aux bornes, aux postes de contrôle de la ville intelligente. Smart-city et humains-machines…
Refuser de jouer selon ces règles c’est également refuser de nourrir l’Ogre, de financer le système et de lui donner des billes.
C’est l’affaiblir, et participer ainsi au processus insurrectionnel.


-> La fraude, l’athlétisme de l’esquive_
S’hacketiver. Pirater la ville jusque dans notre manière de nous y déplacer. Jouer avec elle et ne rien lui laisser. D’abord, entrer dans le réseau. Trouver une brèche, puis s’engouffrer furtivement. Alors, corps et esprit sont tout-deux constamment tendus pour se frayer un chemin entre les brigades de contrôleurs et les barricades à franchir pour arriver à destination. Chaque station passée est un point gagné sur l’adversaire. Le traverser à ses frais et l’épier de près. Connaitre les galeries, les raccourcis, les passages oubliés pour organiser la sortie. L’extraction. Chaque trajet rondement fraudé est une revanche. Parfois… se faire attraper et alors oublier son nom. Disparaitre jusque dans son identité, Devenir liquide. Ils ne nous auront pas !
Parfois, à l’inverse s’il le faut, se tasser dans la foule, assimiler leurs codes.
Payer leurs tarifs pour éviter leur police…


-> Devenir le mouvement pour le re-définir_
Revoir aussi notre façon d’être, de nous mouvoir et de nous émouvoir. De nous déplacer. D’appréhender les espaces et notre rapport au temps. Changer d’échelle. Redevenir terrestres. Ralentir. Ruisseler. Se sentir glisser. Ressentir à nouveau l’herbe sous nos pas. La fatigue dans nos jambes. Les détails… Nos modes de déplacement ne sont plus aujourd’hui à dimension humaine. Nous transplantons, téléportons et laissons forcément une part de nous arrachée derrière. Le mouvement n’est pas vécu. Il faut prendre le temps de redécouvrir notre dimension humaine. Alors, envisager d’autres modes de déplacements pourtant bien connus. La marche, le vélo, le bateau, le cheval permettent de nous mener où nous le voulons, si nous avons le temps d’y aller à un rythme qui, encore une fois, est le notre. Le temps. Le prendre et ré-apprendre. Les mollets irrigués de sang, le pédalier bien huilé, la voile tendue par les alizés et les coups de sabots échappent aux énergies fossiles et donc à la prédation des industries à combattre. Mais bien entendu, s’il nous faut la vitesse pour passer d’un terrain de lutte à un autre, pour nous échapper, alors prenons la.
La stratégie d’évaporation est à développer aux autres services que nous propose le « monde moderne » : refuser leurs puces, comme on ne veut pas des tiques.
Payer cash permet ainsi d’éviter la traçabilité de nos achats et aux petits commerçants d’éviter des frais de transaction bancaire importants. Ne plus numériser nos vies sur des plateformes avides de données personnelles. Ne plus acheter leurs produits. Vider l’argent des banques. Privilégier d’autres formes d’échanges et d’autres formes de monnaie.
Elle peuvent devenir locales ou peut-être cryptos…
Migrer, s’évaporer sur des réseaux parallèles : des systèmes décentralisés, cryptés, égalitaires et pair-à-pair…
S’échapper des prises de l’ennemi pour mieux le démantibuler.
Se soustraire à tout cela se fera sans tristesse ni privation, car ce que l’on hait ne nous manque pas.
Devenir un courant-fluide, diminuer l’emprise…



∼ ∼ ∼


_ETAT GAZEUX / Vivre au milieu_
Sécession et Emancipation
Vers les Zones Libres Auto-Gérées
Harmonie • Autonomie • Résistance

Vivre entre les deux états précédents, entre l’apparition et la disparition.
Suspendus et invisibles, comme une cabane dans un arbre. Comme un nid dissimulé. Comme un caméléon tranquille, qui n’est pas sur son milieu, mais qui devient le milieu.
En Osmose. Il n’est pas entouré par la vie, mais traversé par celle-ci.


_Créer les Bases Arrière_
Bâtir. Nourrir. Vivre autrement.

L’état ou le patronat ne donnent pas, ni salaire ni aides, ils rendent juste une partie de ce qu’ils prennent. Dès lors, demain, du haut de leur pouvoir, ne pourront-ils pas choisir de rendre moins qu’hier ? Car « les temps sont durs et qu’il faut participer à l’effort », que « après tout, nous vous donnons déjà du travail »… Nous devrions presque nous sentir redevables. Ainsi, ils bâtissent leur autorité à cet endroit : le choix de ce qui est à prendre et de ce qui est à rendre. Nous avons remplis leurs coffres, ils peuvent nous vider la gamelle mais ne laissons aucune place à la victimisation ou à l’attente passive. A l’inverse, empuissantons nous ! Les minimas précaires juste bons à endormir la révolte et assurer la domination ne nous intéressent plus, nous voulons tout ! Il n’y a aucun avenir juste et possible avec un pouvoir corrompu, bourgeois et autoritaire, c’est pourquoi, en toute logique, nous devons nous séparer des ces
tutelles-envoûtements, y placer des gardes-fous solides et créer nos propres systèmes d’émancipation collectifs.
Nous devons ériger nos structures pour nous libérer des anciennes et ainsi retrouver notre force collective et individuelle.

Là où l’Etat délaisse, où le Capital perfore : jouer en contrepoint, nidifier des remèdes, bricoler des réponses.
Alors si la force est collective, construisons nous en collectifs autonomes et déterminés. Regroupons-les en Communes libres ou en coopératives, liées ou issues des Groupes Locaux de Résistance.
Tissons les liens réciproques qui font le Commun. Maillons. Multiplions les lieux et les connexions pour broder un réseau, un monde parallèle qui porterait des réponses au démantèlement du Vivant, à la libéralisation économique du globe et à la précarisation du genre Humain. Ils s’acharnent à sauvegarder des intérêts privés, oeuvrons pour l’intérêt commun !
Sur les Zones Libres, réapproprions-nous jusqu’à nos modes de vie. Nos manières d’habiter, de manger, de boire, de travailler, de se reposer, de fêter, de construire, de détruire.
Vivre en étant protecteurs et partisans du Vivant,
Dans tous ces endroits qui disent un autrement,
Dans tous ces endroits qui disent un autre monde…


_Bâtir_
Bâtir en dur nos idées. Assembler une charpente comme on érige une philosophie. Construire des extensions de nous mêmes, des expressions bricolés, belles, et qui savent aussi nous abriter du gros temps, de l’averse, de l’adverse.
S’emparer des espaces, des zones, des terrains, de quelque façon que ce soit : en achetant collectivement, en louant ou en rencontrant d’abord la personne qui prêtera simplement son petit bout de terre, par la réquisition citoyenne (digne nom du Squat !). Que chaque Zone soit singulière, de par sa localisation, sa population et la manière d’y vivre, mais qu’elle soit aussi, tel un exemple ou un terrain d’expérimentation : multipliable, amplifiable, modifiable et rejoignable.
Quelle est l’architecture d’une révolte ? Elle est auto-construite, imaginative et surprenante, parfois fragile, souvent humble. Si l’habitat est léger, la revendication est lourde. Un peu partout, souvent en pirate, poussent des cabanes en bois, en terre-paille, en bric à brac, des caravanes, des camtars pleins de camarades prêts pour la prochaine cavalcade. Parfois la Police rode, menace et détruit. C’est le signe d’être pris au sérieux.
Habiter ainsi, c’est redéfinir les standards et répliquer à la mégalopole. A ce qu’elle propose. Le béton et son monde. Des camisoles de goudron. Des étouffoirs. Lui opposer l’organique. Se ré-insérer dans le tissu vivant.
C’est aussi accéder plus facilement à un logement, car peu onéreux, et ainsi s’indépendantiser face aux banques et aux propriétaires. Et pourquoi pas, en chemin, remettre en question la propriété privé, faire de l’habitat un partage ?
Ne pas défendre la forêt, mais être la forêt qui se défend.
Embrasser, épouser son milieu. Revenir sur Terre et savoir y retourner.
Certains veulent des habitats qui se détruiront naturellement une fois qu’ils ne seront plus d’ici…
Belle leçon d’humilité, merci l’ami Dodo…
D’autres construisent des tours de verre croyant pouvoir rejoindre le ciel. Nous préférons avoir notre demeure près du sol…
Habiter, c’est finalement développer une infinie sensibilité à son milieu de vie. Le laisser raisonner en nous. Respirer l’espace. S’imprégner, l’intégrer, y être en symbiose…
Saisir toutes les nuances vert-tendre des arbres au printemps ; entendre la mélodie des écorces qui rient sous les caresses du vent et les oiseaux que l’on soupçonne seulement de chanter ; sentir l’odeur gourmande de la terre humide après la pluie, ivre d’une eau nourricière ; percevoir le passage furtif d’un animal ; hérisser ses poils au contact d’une variation de température de quelques degrés centigrades… un nuage est passé jeter une ombre.
Etre pleinement au milieu. Ici et maintenant.
La porte est ouverte.
N’hésitez pas à rentrer.


_Nourrir_
La nourriture était un médicament. Celle d’aujourd’hui tend plutôt vers le poison. Traitée et standardisée puis vendue à l’étalage. Est-ce avec cela que nous devons nourrir la Vie, les enfants, les amis ?
Même les couverts tombent malades.
Les fourchettes perdront bientôt leurs piquants…


Encore une fois, ici, plus besoin de preuves ni de se justifier. Il nous faut juste répondre. Nous organiser. Trouver comment vivre autrement. Retrouver un chemin, un art de vivre que nous avons perdu en route et que nous pouvons ré-inventer aujourd’hui. Quel tour de force incroyable, que d'avoir réussi à nommer « Progrès » ce qui ne tient que du désastre. Force du Novlangue. Les intérêts sont privés, les pertes communes.
La science rationnelle à tué l’accès au savoir par l’empirisme et l’écoute des sensations. L’industrie pharmaceutique a tué les sorcières, et pas mal de patients… L’industrie agro-alimentaire a tué les paysans, les sols et la vie des champs. L’industrie automobile a tué les ruelles où courraient les enfants…
La destruction du Vivant semble être un bon placement financier… Nous investirons ailleurs.
A l’heure où le monde est hors sol, notre progrès sera de redevenir Terrestres. Ce n’est pas revenir en arrière, mais au contraire, se ré-insérer dans le courant du Vivant. Le mot « connexion » n’a jamais autant voulu dire « déconnexion ». Nous ne sommes rien d’autres que Vivants, et n’avons jamais autant vécu dans l’inerte. Morts. Qui sait encore dire qu’elles sont les essences d’arbres croisées lors d’une balade dans un restant de forêt ? Comment se prendre pour des Dieux quand notre survie dépends des abeilles ? Nous vivons au sein d’un écosystème sensible, fragile et connecté. Comment envisager notre existence sans permettre à la vie dont nous dépendons d’elle-même se perpétuer ? Nous avons été arrachés alors il nous faut revenir.
Revenir au bon sens paysan.
Arrêter de nous confronter au Vivant, mais le comprendre, donc le prendre, dans le sens de « l’embrasser », coopérer avec lui.
Arrêter de domestiquer, nous en avons vu les limites, mais ensauvager et être attentifs.
Il ne s’agit plus seulement d’arrêter la destruction des sols mais aussi de permettre leur régénération. L’avenir alors est sauvage, beau et indiscipliné. Laisser le Vivant reprendre ses droits, ses forces, sa place. Sur certaines zones, prélever avec raison et sur d’autres, avoir le respect de ne pas intervenir, les sanctuariser pour laisser vivre et mourrir en paix. La vie saura prendre soin d’elle-même. N’avons nous pas assez fait ?
La nature ne vit pas en ligne, comme une révolte elle n’accepte aucun conformisme, ne suit aucun chemin tracé. Encore une fois, elle est bonne école pour qui sait voir, distinguer, écouter, observer et en tirer des leçons.


Un des enjeu principal des décennies à venir sera l’alimentation d’un population croissante dans un contexte de dérèglement climatique de grande ampleur. Les phénomènes météorologiques extrêmes vont en s’amplifiant, ce qui vas et devras considérablement modifier nos méthodes d’agriculture. Elles devront être plus résiliantes et autonomes, capables de produire plus de nourriture sur moins de surface et avec moins de ressources. Nous irons ainsi vers des méthodes beaucoup plus pérennes et positives : retour du travail à la main, des céréales-jardinées, des légumes anciens et vivaces, création de forêts-jardin et de systèmes d’agro-foresterie, installation de micro-fermes en permaculture nichées dans les villes (où l’enjeu alimentaire est énorme) ou dans les bocages…
Car la steppe, modèle contemporain de l’agriculture est ce qui précède le désert, nous planterons des forêts pour avoir des oasis !
Il y a de nombreuses compétences et joies à retrouver.
Nous redeviendrons paysannes et paysans !
Redécouvrir les plantes sauvages et les baies. Savoir les repérer, les cueillir, pour obtenir une partie de notre subsistance d’une abondance naturelle. Imaginer le plus grand nombre de plats, de recettes différentes avec les mêmes ingrédients. Combien de variations peut-on trouver autour de l’Ortie ?
Apprendre à associer — plutôt que ségréguer — des espèces pour qu’elles s’entre-aident ; à optimiser et valoriser le tout, de l’eau de pluie aux déchets organiques ; à rendre la vie possible en créant un éco-système viable sur le long terme. Savoir faire naître, protéger et tuer comme il faut. Magnifier les cycles de vie. Ce n’est donc pas se priver, mais s’empuissanter.
La liberté n’est pas un état, mais un processus dans lequel choisir ses contraintes c’est gagner.

Car nous ne sommes jamais solitaires, mais toujours des vivants parmi d’autres vivants — similaires ou d’autres espèces —,
rendons nos inter-dépendances belles, souhaitables et soutenables.
Car nous ne sommes jamais solitaires,
Oeuvrons pour le Commun.

« Le temps payé ne revient pas. »

Serge Utgé-Royo



_Travailler ?_
Préférons oeuvrer.
A une oeuvre personnelle.
A une oeuvre commune.
A une oeuvre inachevée, peut-être, puisque c’est permis.
La spécialisation et le cloisonnement du travail empêchent d’acquérir une conscience globale du système de production. Etre un rouage, un écrou, c’est être privé de la visibilité sur la chaîne entière, c’est ne pas pouvoir gouter ni estimer la finalité de son travail. A l’inverse, redevenir Entier, c’est augmenter ses compétences, ses expériences, ses savoirs. C’est multiplier ses vies. Maitriser un processus du début à la fin pour s’autonomiser, pour gagner en puissance, et puisqu’un savoir acquis quand il se donne ne se perd pas, alors nous croitrons joyeusement ! En nous libérant du patronat, nous trouverons de nouveaux rapports au travail et à la production. Peut-être qu’alors nous formerons des coopératives auto-gérées et les intégreront elles-mêmes à une coopérative intégrale, que nous nous organiserons ainsi pour assurer notre santé, pour répondre à nos besoins, que nous mutualiserons les outils et partagerons les recettes. Nous nous affranchirons ainsi de l’état par nos initiatives concrètes. Choisir de ne plus collaborer. De ne plus offrir à une industrie notre temps, notre sueur, notre corps, notre intelligence. Ne plus troquer nos vies contre un peu de métal, de billets imprimés ou de chiffres virtuels.
L’Humain n’est pas à vendre. Le Vivant n’est pas une marchandise. La véritable croissance est celle des arbres qui poussent, des enfants qui grandissent, de la vie qui se tisse…
Nous ne suivons aucun autre cours que celui de nos liens qui s’épaississent.
Faire Commun et Commune, c’est se tenir ensembles car nous le voulons bien. N’est-ce pas une plus belle raison qu’un salaire ? Nos échanges, nos rapports, ne valent aucun prix. Alors ils ne cessent de se développer librement. De se tisser. De se mêler. De se nouer comme des racines, comme un mycélium qui s’épanouit.

« Du grain de riz à la parole, Tout doit être breveté, plus rien n’est gratuit. La gratuité est désormais le vrai scandale, Absolument illégal parce que véritablement subversif. »
Sergio Ghirardi


_La gratuité nuit gravement au capitalisme_
Alors donner, autant que possible !
Sortir des logiques de marché. Créer les anti-marchés ! Zones de gratuité, de dons, d’échanges de services, de troc en tout genre : de savoirs, de graines, d’objets, de compétences, d’histoires, de rigolades, de larmes et de sourires doux. Pour qui sait se satisfaire d’assez et obtenir du Vivant une bonne partie du nécessaire, l’abondance émerge rapidement. Il faut juste laisser dans la poussière les illusions qu’offrent le marché et ainsi mieux se (re)trouver. C’est refuser de se fondre dans la machine et de se briser dedans. De s’oublier en chemin. De perdre sa vie à la gagner…
C’est une autre forme de richesse, celle de notre authenticité, de notre joie de vivre tel que nous l’aurons choisi, avec ce que nous aurons choisit. Celle des liens que nous aurons tissés. Bien-entendu, pour que cette vie soit durable, le confort est à remettre en question et à ré-inventer, mais pas à exclure. Il s’agit juste de réajuster les choses, redéfinir les standards…
Créer un modèle émancipateur parallèle pour tuer le système oppresseur en le rendant inutile, caduque, car nous n’avons plus le choix : voici l’économie de l’insurrection. Aucun retour à la norme n’est prévu. Nous ferrons la grève-générale illimitée et boycotterons massivement, car s’il n’y a plus de capitaux produits, il n’y a plus de capitalisme. Alors nous ferrons ce qu’il faudra pour outiller nos idées et répondre nous-mêmes à nos besoins et envies.
Nous amputerons l’Ogre du peu qu’il avait à offrir en lui opposant notre autonomie-liberté.


∼ ∼ ∼

_Méthodes_
Quand des Humains et autres qu’Humains s’associent et s’organisent pour se tenir ensembles sur des Zones Libres, de nombreux modèles, modules, peuvent se développer, s’inventer et se greffer les uns aux autres afin d’autonomiser et de préserver l’individu, le collectif et le Vivant.
Encore une fois, ici, rien d’exhaustif ni de défini.

Car l’accès à la terre est une question primordiale, des achats groupés de terrains (sous la forme, par exemple, d’une société civile à capital variable, avec entrée à investissement minime) pourraient permettre de créer des biens communs, en facilitant leur acquisition et en diluant la propriété privée dans un trop grand nombre d’acheteurs. Des forêts pourraient ainsi être obtenues via des groupements forestiers afin d’en faire des sanctuaires du sauvage ou des lieux de sylviculture, une gestion douce et responsable qui permettrai d’en tirer du bois de chauffe et d’oeuvre tout en laisser la forêt se perpétuer. De la même manière, des terres agricoles acquises par la Commune viendraient la nourrir, sous forme de jardins partagés ou autres forêts nourricières. Elles reprendraient place là où jadis vivaient des communaux. D’autres biens communs comme des sources d’énergie, tel que des moulins ou éoliennes citoyennes, pourraient appartenir et profiter à des petits groupes qui s’autonomiseraient ainsi face à l’Etat-Entreprise. Des bâtis pourraient venir compléter le projet afin d’ouvrir des lieux d’hébergement, d’accueil, de réunion… Le squat ou l’occupation, bien que souvent moins durables, restent bien-sûr un complément stratégique afin de libérer les places et les habiter de nouveaux. Des mairies pourraient être reprises avec des listes citoyennes participatives afin d’y appliquer des principes du municipalisme-libertaire ; lisez Murray Bookchin ! Des terrains pourraient être acquis en collectif afin de résoudre des problématiques d’habitat et de subsistance.
Que partout poussent des maisons du peuple et des forêts-jardins !


Dans les collectifs pourraient naitre des caisses communes où chaque membre déposerait ses revenus (ou une partie) afin de les mutualiser avec le groupe. Les postes de salariat permettant des rentrés d’argent parfois nécessaires pourraient eux aussi se partager, afin de libérer du temps de travail à chaque individu. Les savoir et compétences, pour ne pas les enfermer dans des monopoles de la connaissance, devraient eux aussi se partager, se transmettre, de manière pratique lors d’activités participatives et collectives, ou de manière orale, écrite, dansée, mimée… Autonomiser l’individu, ainsi il autonomisera l’ensemble. Les savoirs anciens, sources d’une sagesse lointaine, seront à sauvegarder au possible avant d’être perdus, puis à transmettre de nouveaux afin de se perpétuer, de rester liés à des époques lointaines, au temps profond. Pour et par les paysans, des semences locales et reproductibles seraient bien-entendu à préserver, partager et faire perdurer. Afin d’éviter les nuisances des hautes fréquences d’ondes sur le Vivant, des zones blanches, sans réseau, pourraient être définies. Pour en prendre soin et minimiser les achats et coûts de réparations les outils pourraient eux aussi être mutualisés au sein d’une ou plusieurs Zones. Les cultures pourraient également être pensées et menées en commun entre plusieurs fermes ou terrains (notamment pour des céréales demandant de l’espace, du temps et de la main d’oeuvre). Dans le but de se libérer des technologies et de libérer les technologies d’elles mêmes et de leur gourmandise, des technologies-basses, low-tech, simples, réparables, durables et peu-onéreuses pourraient être inventées, construites et mises à disposition du Commun. Les réseaux, interfaces, et systèmes d’échanges de services devraient se faire de pair-à-pair — P2P ou rien —, sans intermédiaire, tierce-partie ni prélèvement mais en relation directe entre les personnes. « Décentralisez-moi cette merde » ralle un ami à raison… La récupération, afin d’amplifier le cycle de vie des objets déjà produits pourrait être l’une des grandes sources d’approvisionnement en matériaux et outils. Pour éviter l’aliénation à un terrain ou à une activité les taches nécessaires à la vie quotidienne pourraient être rotatives et relayables, de même que les postes-clefs, s’il en y a. Des écoles alternatives, maisons de retraite auto-gérées ainsi que des auberges d’accueil pourraient naître. Une gouvernance horizontale serait le fruit d’une auto-gestion des Humains entre-eux, basée sur une démocratie directe et radicale, faite par pour et avec les habitants des lieux. L’attention à l’autre et la responsabilité en tant que habilité à répondre : capacité à s’augmenter et à se corriger ensembles ; seraient au coeur de ces fonctionnements.


En reliant les terrains, collectifs, fermes, jardins, coopératives, en connectant toutes ces zones-libres viendrait peut-être une coopérative-intégrale, une Commune. Un réseau dense d’échanges et d’inter-connections. De liens.
Pourrait enfin naître, encore plus largement, une confédération des Commues qui viendraient, se substituer à l’Etat et au capital. Un tissu de la résistance, un maillage des zones-libres, un écosystème de fermes autonomes, un réseau des tempêtes qui faciliterait les échanges, qui fertiliserait les combinaisons, qui nouerait les associations. Viendrait peut-être une réappropriation globale du territoire. Partout à la surface du globe pousseraient des ilots autonomes.
Connectés, ils deviendraient Archipels. Des Assemblées d’assemblées se tiendraient où seraient envoyés, par tirage au sort, des représentant.e.s de chaque Commune. Afin d’éviter de tomber dans le laisser-aller et de pouvoir être remises en question, régulées, renouvelées, amplifiées, les Communes devraient être rejoignables et ce au delà des groupes affinitaires, ce qui sinon mènerait à des poches d’entre-soi. Des habitats pourraient ainsi être conçus, fabriqués et mis gratuitement à disposition sur chaque zone afin de faciliter les migrations et installations. Il s’agit peut-être aujourd’hui d’un horizon lointain, mais s’il est partagé, fixons-le et avançons, nous le toucherons peut-être bientôt.


∼ ∼ ∼


Si ces trois états : Solide - Liquide - Gazeux, dialoguent, alors un courant se forme. Un mouvement. Une dynamique nécessaire entre les Bases Avant et les Bases Arrières, entre création et destruction.
De la même manière que la liberté ne peut exister sans l’égalité, la résilience ne peut exister sans la résistance.
Nous ne pouvons pas simplement nous soustraire à ce système car il continuerais sans nous,
Nous ne pouvons pas simplement nous défendre de ce système car il attaquerai encore et ailleurs,
Alors nous devons attaquer ce système et défendre les nôtres tout en créant la suite…

Est-ce une utopie ?
Il s’agit d’une pulsion de vie : De préférer l’idéalisme à l’apathie, le mouvement à l’immobilisme et l’insurrection à la servitude volontaire.
Il s’agit d’un levier, d’un pied de biche pour faire plier nos conditions actuelles d’existence vers un demain-meilleur.
Il s’agit d’un enchantement des imaginaires et des possibles.
Donc oui ! C’est une Utopie, concrète et nécessaire.
Il s’agit du nouveau récit que nous nous inventons pour avancer,
Et avons nous le choix ?
Car aujourd’hui, soldats malgré nous, nous en sommes là :
« L’Utopie, ou la mort ! »



CONCLUSION / NOUS NE SOMMES QU’AU PREAMBULE_
Nous vivons actuellement un glissement radical. Une métamorphose de grande ampleur qui va jusqu’à un changement d’ère géologique, ainsi qu’une sixième extinction de masse. En quelques deux cent ans, nous avons quitté l'Holocène (âge interglaciaire des 10.000 dernières années) pour entrer dans l’Anthropocène, l’âge de l’Humain, devenu tellement puissant qu’il est en mesure de transformer le monde en profondeur et de manière irrémédiable. Si ce nouvel âge est celui de l’Humain, tâchons d’en être dignes. A cette échelle de bouleversement, si nous voulons lutter, les « petits gestes » ne suffisent plus.
Nous marchons déjà dans les méga-centres comme sur des ruines perdues, des abysses modernes. Il est indéniable que l’ancien monde et son système thermo-industriel sont en train de couler, alors profitons en pour accompagner sa chute et par-là réinventer demain.

La Révolution liquide est un double processus : intime et externe.
Sentir ce qui nous compose au plus profond. Ce qui coule en nous. Ces marrées intérieures qui nous irriguent. Cette tempête qui gronde. Se laisser parfois submerger et guider par nos intuitions car nous devons naviguer dans la brume. Ouvrir les vannes et laisser couler les fluides sauvages d’une nouvelle façon d’être à soi-même et au reste, à l’écoute, tendus vers le véritable, vers la source. Limpides comme de l’eau qui passe et humbles comme une goutte qui se contente des strates les plus inférieures. Qui cherche toujours à rejoindre la Terre. La Profondeur-féconde.
Puis s’ensauvager. Sortir du lit comme la rivière démontée, libre et furieuse. Modifier nos rapports au monde, le traverser comme l’eau qui s’infiltre dans le sol pour aller nourrir un renouveau.
Se frayer un chemin, coute que coute.
Goutte à goutte.


Nous avons besoin de tout le monde. Et le monde entier est là. Il se tient debout, sur la croûte du globe. Prêt, curieux, endormi, créatif, angoissé, fatigué, attentif : Vivant.
Nous avons toutes les raisons plus la force, la folie, la beauté, l’intelligence, la foi et le courage, et nous en trouverons encore plus s’il en manque ! Alors entrons en mouvement !
Nous avons besoin de tout le monde et de toutes les méthodes. Nous avons besoin du précis, du technique, comme de l’absurde et du poème. Se renouveler, muer, passe par recoloniser les imaginaires. Inventer de nouveaux outils pratiques mais aussi de nouvelles histoires. Des récits poétiques qui font que l’on conçoit le monde autrement, qu’on le ré-invente. Les mots sont tellement plus constructeurs qu’ils ne sont descriptifs… Alors ne pas se restreindre ni se satisfaire, mais sortir et éclater les petites bulles, les convenances, les registres, l’académisme. Tirer profit de la richesse, de la multiplicité. Il est temps de s’allier, de se greffer, de s’hybrider. Croiser les tactiques. Mêler les formes. Se mouvoir. S’émouvoir. En fait, il s’agit de saturer la carte afin de brouiller le signal. De se faire Polymorphes, neufs et originaux. Incapturables.
Mais il nous faut surtout nous relier, à petite et à grande échelle. Des villes aux campagnes, des blocages aux bocages. Créer des canaux pour que passe le courant. Un réseau-liquide pour amplifier la Résistance, l’Autonomie et le Partage. Il peut-être formel, prendre place sur des plates-formes numériques, des radio-pirates ou devenir un papier qu’on se passe sous le blouson, une carte qu’on dessine et qu’on planque par endroits, des mots qui se baladent de bouches à oreilles, qui se dispersent.
Qui éclaboussent.
Qui irriguent
La Révolution Liquide_

« Si tu ne participes pas à la lutte, tu participes à la défaite. »

Bertolt Brecht



-> La Révolution est à venir_
Mais pour la France, elle n’est sûrement pas pour aujourd’hui. Nous avons encore trop à perdre. Il nous reste quoi ? Notre précarité existentielle, un confort terne et bas-marché, arraché au prix d’un travail que nous ne souhaitons sûrement plus faire, mais que nous continuons des heures durant tout en envisageant de claquer la porte, avant de rabaisser la tête pour se remettre au boulot. Il y a bien des factures à payer. Quelques divertissements de mauvais gout, de l’art bourgeois ou de la poésie pour les chanceux, quelques heures de plaisir où nous nous évadons de nos camisoles avant d’y replonger à la sortie du film. La réalité est bien plus crue. Quoi d’autre ? La société, les amis, la famille et puis la crise de nos présences, où plus personne n’existe, où tout le monde se croise, autant connectés qu’absents, où les nouvelles s’obtiennent au travers d’un fil numérique, où l’on se parle à travers un parloir digital, nous les bagnards du modernisme. Et quoi encore ? La randonnée, la bio-diversité dans des parcs et réserves, la nature, si belle sur nos écrans de veille, car c’est bien en veille et devant des écrans que nous voyons maintenant le monde sauvage. Mais combien reste-il d’éléphants ? Les abeilles survivront-elles l’année prochaine ? L’air qu’on respire nous file le cancer, les arbres s’asphyxient en été, les inondations et tempêtes frappent en hiver, tout s’embrase, mais il nous reste encore un peu. Quoi ? Un potager ? Faire pousser quelques légumes pour avoir la sensation d’être un peu plus terrestre et comme préservé du désastre. Mais rien ni personne n’est à l’abri, et si vous croyez l’être, ce n’est pas une raison pour ne pas lutter pour celles et ceux qui ne le sont pas ! Et alors quoi, trier le plastique, manger moins de viande, mais s’occuper nos bonnes consciences n’arrêtera rien au drame en cours. Les marches pour le climat et leurs farandoles arriveront peut-être à planter des champs d’éoliennes et à ouvrir des débouchés au capitalisme vert mais n’endigueront en rien nos catastrophes sociétales.
Non, l’entreprise ne sera jamais éthique, le capitalisme ne sera jamais civilisé, l’industrie ne sera jamais propre et la croissance jamais verte, alors le feu brulera temps qu’il y aura du combustible, temps qu’il y aura encore une molécule à changer en argent, temps que nous nous satisferons encore de ces structures de contrôle et d’oppression.
Non, nous avons encore trop à perdre.
Nous ne sommes pas assez désespérés.
Alors quoi ?
Si tout cela n’est pas assez, que faut-il encore ?
Malheureusement, il faudra peut-être que d’autres crises adviennent. Que la taupe creuse plus profond, que tout se désagrège encore plus, qu’enfin plus rien ne tienne et alors, peut-être, quand nous n’aurons plus rien, tellement plus rien que nous n’aurons même plus peur, que nous ne pourrons plus nous complaire dans l’imposture et la tiédeur, dans la triste satisfaction du peu qu’on nous offre, alors, enfin, quoi ?
Peut-être une révolution. Des flammes, des larmes et du bruit. Et des fleurs aux fusils. Mais de la violence, car elle ne pourra être que violente, la révolte, au point de rupture. Quand l’élastique claque.
Violente car nous n’aurons enfin plus rien et ceux d’en face encore beaucoup, leur luxe barricadé, alors ils enverront les mêmes racailles, leur milice d’employés : leur police-armée.
Alors des pauvres se battront entre eux sous les yeux et les bras croisés des responsables bourgeois. Et pourquoi tout ce combat ? Installer une nouvelle tyrannie ? Eux, les prochains tyrans se tiennent prêt, à l’affut, cartes en main.
C’est pourquoi nous devons oeuvrer dès aujourd’hui pour qu’ils n’adviennent pas, les fascismes, car nos sociétés sont bien en train de se décomposer et les insurrections, elles, d’arriver. Alors allons-y ! Remontons nos manches, prenons nos bêches pour amener ce qui vient et nos faux pour couper ce qui est. Préparons le terrain afin que fleurisse un véritable idéal. Que la violence qui jaillira ne soit pas veine. Prenons parti, maintenant, dès aujourd’hui et à chaque instant. Plus rien n’est neutre. Alors positionnons nous. Il va falloir le faire.
Créons un front international du vivant ainsi que des groupes locaux de résistance.
Formons une meute humaniste, anti-capitaliste et radicalement écologique !


« Ceux qui ont pris tout le plat dans leur assiette, laissant les assiettes des autres vides, et qui ayant tout disent avec une bonne figure, une bonne conscience "Nous, nous qui avons tout, on est pour la paix !", je sais ce que je dois leur crier à ceux-là : les provocateurs de toutes violences, c'est vous ! Et quand le soir, dans vos belles maisons, vous allez embrasser vos petits enfants, avec votre bonne conscience, au regard de Dieu, vous avez probablement plus de sang sur vos mains d’inconscients, que n'en aura jamais le désespéré qui a pris des armes pour essayer de sortir de son désespoir. »

Abbé Pierre.


-> Supplément au nom de l’art_
Une société sans art est une société barbare.
Il a donc une place haute et nécessaire mais doit également, au même titre que chaque autre fragment de la société, être remis en question. L’art élève, dit ce que les langues Humaines ne peuvent exprimer, suggère l’invisible, fais goûter l’Eternel. Indispensable. Mais aujourd’hui, dans la société de consommation de masse où nous vivons, l’art n’a-il pas finalement été, lui aussi, absorbé par le Capital ? Avalé, mâché, puis recraché sur des scènes énormes, des plateaux-télé, des écrans géants et des écouteurs sans-fil. Fondu dans ce que l’on appelle culture ou divertissement, il répond alors à un ministère au même titre que le commerce ou les armées. Signe d’une industrialisation des oeuvres, l’artiste se mue en producteur avec une offre à créer, une demande à satisfaire, un marché à nourrir et un produit à emballer. Subventionné par l’Etat ou répondant à des logiques de marché, peut-il encore être subversif ?
Ne participe-il pas, bien que certaines oeuvres soient Grandes, à un royaume fait de complaisance et de contemplation passive ? Une diversion douce qui rend le reste du réel supportable, qui atténue la dureté, qui offre juste assez de beauté pour s’en satisfaire et oublier l’ignoble. La tableau qui cache le mur à abattre. L’art subversif vit alors sûrement dans les failles, gratuit et populaire. Offert à la Rue et aux sourires qui passent par là. Evacué des logiques capitalistes. Sorti de l’académisme, de la gloire et des paillettes de la renommée, du culte de la personnalité.
Oublier l’oeuvre une fois achevée, la laisser vivre puis mourrir, n’est-ce pas ainsi la rendre Eternelle ? N’y a-il pas plus belle preuve d’Amour que de savoir laisser partir ? S’évanouir dans l’Oeuvre. La laisser reculer. Peut-être l’anonymiser pour ne pas s’y retrouver captif. Qu’elle ne devienne pas le piège de l’artiste. Une camisole musicale. Une prison picturale, bien que peinte de bonne foi, d’Amour, de rage ou de sublimes sentiments.
Ne faut-il pas aussi déformaliser les pratiques pour les libérer d’elles-mêmes ? Les rendre accessibles. Neuves. Mais surtout, plutôt que de le ségréguer, faire de l’art chaque moment de la vie, le libérer des frontières que lui impose le cadre de l’Oeuvre mais le vivre à chaque moment, dans notre manière de nous déplacer, d’habiter, de nous vêtir, de manger, de regarder, de nous exprimer. D’être. De vivre.
Lui redonner sa place centrale.
Le revendiquer du quotidien et le rendre ainsi primordial et omniprésent.

Il est sûrement triste de constater que l’art n’est peut-être pas suffisant.
Suffisant pour changer les Humains, pour transformer nos façons d’être au monde, pour nous rapprocher assez du merveilleux jusqu'à atténuer nos défauts. Peut-être n’a-il aussi jamais eu cette vocation. Alors n’est-ce pas l’heure d’avouer ses limites, de ne plus s’en contenter et, sans le nier, d’aller aussi ailleurs et plus loin ?
Enfin, il y a peut-être une poésie immense à danser dans les flammes, à chanter sous l’orage, à trouver sa limite ici :
Etre aussi Prodige qu’Incapable.
Et cette idée reste d’une humanité magnifique…


« Si Dieu veut l’incendie, il veut des ritournelles. »
Comme disait Brassens…


∼ ∼ ∼


Ce texte s’achève ici et maintenant. Il n’a pour seul but que d’ouvrir des perspectives, des brèches par lesquelles s’engouffrer, dans les crânes et les systèmes.
Il m’a permis une mise en mouvement, et à été partagé dans l’idée qu’il pourrait aussi, alors, le permettre à d’autres. Sait-on jamais… Dès l’instant où il circule, ce que je lui souhaite, il n’est plus mien et vit alors librement.
S’il vole assez loin et arrive entre vos mains, sous vos yeux, dans vos oreilles, il devient aussitôt vôtre alors s’il a raisonné en vous, merci d’en parler, de le dupliquer, photocopier, partager, propager.
D’aider à trouver assez d’eau, pour peut-être éteindre les flammes…

Et n’oublions pas de faire de tout ça, de ces temps délicats, Un joyeux combat !


A_


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-> Quelques chiffres de plus_

  • « Les catastrophes dues aux crises climatiques se produisent à raison d'une par semaine. Selon les estimations, le coût des catastrophes liées au climat s'élèverait à 520 milliards de dollars par an. » ONU - 07/07/2019 *

  • Selon la Banque alimentaire et l'ONU : « plus de 100 millions de personnes pourraient basculer dans l'extrême pauvreté et près de 600 millions pourraient souffrir de malnutrition d'ici 2080. » *

  • « Il pleut et neige du plastique dans les Pyrénées. Des chercheurs ont mis en évidence la présence de microplastiques dans les neiges et pluies dans une zone pourtant à l’abri des activités humaines. Nous avons constaté un dépôt de plus de 365 particules de microplastiques par m2 et par jour » Rapport du CNRS ; Le Parisien - 18/04/2019

  • « 90 entreprises mondiales ont été à elles seules responsables de l’émission de 63% des émissions mondiales de gaz à effet de serre depuis 1751. » Richard Heede ; Climatic Changes - 2014

  • « La dette publique des États-Unis a battu tous les records précédents en atteignant 21.000 milliards de dollars » Département du Trésor américain - 2018

  • « En agriculture, lors d’un épandage, jusqu’à plus de 90% des produits ne sont pas absorbés par les plantes et se retrouvent dans les sols, où ils peuvent persister, contaminer les eaux et migrer vers les zones non-traitées. » TFSP Consortium

  • « Aujourd’hui, 80% de la population mondiale est exposée à des risques de pénuries. » C.J Vörösmarty ; revue Nature - 2010

  • « Selon Oxfam, 62 personnes possèdent désormais autant que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. » 2016

  • « En janvier 2013, un seul spécimen de thon rouge à été vendu pour 1,7 million de dollars à Tokyo. » K Swing ; revue Nature - 2013



Et maintenant, Qu’il pleuve !

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Version remaniée du : 30/10/2019
Quelque-part où des réponses s’imaginent…