Louise Michel

Pensée dernière

1887

En plongeant dans le passé, on le voit se joindre à l'avenir comme les deux extrémités d'un arc de cercle, et ce cercle, pareil aux ondes sonores, en éveille d'autres à l'infini.

Émiettées de par le monde ( de l'Inde antique jusqu'à nous ), les sciences perdues vont-elles germer ou sont-elles mortes dans la fleur ?

Faut-il attendre d'effluves nouvelles d'autres recommencements ? Suffira-t-il de retourner le sol pour donner aux germes du renouveau les conditions propres à l'existence ?

Combien de civilisations ont sombré, combien d'hypothèses scientifiques se sont renversées devant d'autres hypothèses !

Pourtant, allons, allons toujours ! N'a-t-on pas de quoi éteindre la lutte pour la vie ? de quoi remplacer l'anxiété des estomacs, la misère générale par le bien-être général ?

D'ailleurs, les cerveaux devenant plus que jamais avides, il faudra bien pour les satisfaire que brille l'Ère nouvelle.

Si l'amour de l'humanité est impuissant à faire sonner l'heure libératrice à l'Horloge fraternitaire -- heure où le crime n'aura plus de place -- l'indignation s'en chargera.

Là haine est pure comme l'acier, forte comme la hache ; et si l'amour est stérile, vive la haine !


Consulté le 31 décembre 2016 de fr.wikisource.org